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Cet article est le premier d’une série portant sur des exploits réalisés par de jeunes sportifs. Il met en lumière le premier des douze sacres de Rafael Nadal, sur la terre battue de la Porte d’Auteuil, à l’âge de 19 ans.

En 2003, Rafael Nadal fait son entrée sur le circuit ATP, il est alors âgé de seulement 16 ans. Vainqueur des Petits As de Tarbes en 2000 (Championnats du monde officieux pour les 13-14 ans) et ayant remporté son premier match chez les professionnels à tout juste 15 ans, il est un véritable phénomène sur lequel le tennis espagnol fonde déjà de grands espoirs. Dès son entrée sur le circuit professionnel, Rafa répond aux attentes placées lui et comme une évidence, c’est sur terre battue, plus précisément du côté de Monte-Carlo que l’aventure commencera. En principauté, Nadal pose déjà les premiers fondements de sa suprématie future en écartant son compatriote Albert Costa, vainqueur de Roland-Garros une année auparavant.

Rafael Nadal en 2003, à Hambourg

Cependant, malgré ces débuts en fanfare, le reste de l’année est assez compliqué. Une fois la saison sur terre passée, le jeu de Nadal est moins impactant sur les autres surfaces et cela se ressent sur ses différents résultants. Il finit tout de même l’année à une honorable 46e place mondiale, à 17 ans.

L’année 2004 est également faite de hauts et de bas. Nadal y honore sa première sélection en Coupe Davis, contre la République Tchèque. Il participe à ses premiers Jeux Olympiques à Athènes, remporte son premier tournoi ATP, à Sopot et bat Roger Federer, premier mondial, à Miami. Cependant, une blessure voit sa saison sur terre battue être perturbée. Il est contraint de renoncer à Roland-Garros, mais également à Wimbledon en raison d’une fracture au pied gauche. Cette blessure l’oblige à être écarté des terrains pendant 3 mois. Cette coupure en pleine ascension entraîne une saison assez inégale qu’il finira à la 51e place mondiale, moins bien qu’en 2003.

Le jeune majorquain attaque donc la saison 2005 avec l’envie de rattraper le temps perdu. En pleine possession de ses moyens physiques, Nadal est désireux de s’affirmer au plus haut niveau et de montrer au monde entier, la plénitude de son bagage tennistique. Dès le début de saison, il rallie pour la première fois la deuxième semaine d’un Grand Chelem, à Melbourne. Un palier de franchit mais qui n’est rien par rapport à ce qui va être réalisé par la suite. En effet, à l’aurore du top départ de la saison sur terre battue, personne ne peut encore prévoir l’ampleur du tsunami qui va alors déferler sur la planète tennis. Le 14 février 2005, à Costa do Sauípe, le début de l’Open du Brésil en dévoile les prémisses. A partir de cette date, Rafael Nadal ne laissera que des miettes à ses adversaires sur la surface ocre : 5 tournois remportés dont 2 Masters 1000 (Monte-Carlo et Rome), pour une seule défaite à Valence. Son coup droit lasso apparaît comme une arme létale, son mental est inaltérable et sa vitesse de déplacement oblige toujours l’adversaire à réaliser le fameux « coup en plus » pouvant entraîner l’erreur. Dès lors, il s’affiche comme un des grands favoris de la quinzaine parisienne, à 18 ans, faut-il le rappeler.

A Paris, en étant tête de série numéro 4, le tableau apparaît comme dégagé pour le joueur espagnol. Cependant, un potentiel 1/16e de finale face au nouveau prodige du tennis français, Richard Gasquet est dans la tête de tous les fans de tennis. Le Français, âgé de 18 ans également (né 15 jours après le majorquain) connait une saison incroyable sur terre battue. A Monte-Carlo, il réalise l’exploit de faire chuter Roger Federer, numéro 1 mondial, après avoir sauvé trois balles de match, avant d’échouer en demi-finale face à… Rafael Nadal, dans un match tout aussi accroché. Peu de temps après, il devient même le premier joueur issu des qualifications à atteindre la finale d’un Master 1000, à Hambourg, finale perdue face au revanchard Roger Federer. Nadal-Gasquet, le face-à-face fait déjà saliver d’avance.

Pour les deux protagonistes, l’accès aux 1/16e de finale se fait sans véritable accroc. Rafa ne laisse aucun set à ses adversaires, tandis que le Français en perd un en tout début de tournoi avant de dérouler. Le choc des surdoués peut avoir lieu. La logique y est respectée. Le numéro 4 mondial ne fait qu’une bouchée de son adversaire : 6-4, 6-3, 6-2. Un gouffre sépare les deux joueurs. Nadal est inarrêtable, rien ne semble en mesure de calmer la furia espagnole.

Source: Mathieu de Martignac

Richard Gasquet et Rafael Nadal avant le début du match

En 1/8e de finale, un autre Français tente de lui faire face : Sébastien Grosjean. Ce dernier lui pose de grands soucis avant que la pluie n’interrompe les débats, à une manche partout. Mais que faire face à un tel monstre ? Au retour sur le court, le majorquain ne laisse aucune place au hasard et remet les pendules à l’heure : 6-0, 6-3 sur les deux derniers sets. Grosjean aura cru à l’exploit mais la marche était bien trop haute.

Au tour suivant, face à un David Ferrer éprouvé par ses matchs précédents, Nadal ne fait aucun pli et l’emporte en trois sets secs : 7-5, 6-2, 6-0. Il retrouve alors son rival de toujours, le suisse Roger Federer, pour une demi-finale au sommet, un des premiers grands volets de la saga. L’Helvète n’a jusque-là lâcher aucun set à ses adversaires et semble en mesure d’inquiéter grandement son adversaire du jour. Lors des deux premières manches, les débats sont équilibrés. Le coup droit de Nadal fait toujours autant de ravages mais les répliques du numéro un mondial sont tout aussi cinglantes. Lors du troisième set, l’Espagnol décide de passer la surmultipliée.  Les passings en bout de course s’enchaînent, tout comme les coups droit de décalage et chaque point remporté par Federer est le fruit d’une véritable lutte. Roger ne peut que s’incliner face à une telle adversité. Le majorquain fait déjà de Roland son jardin. Il se qualifie en finale pour sa première participation, alors qu’il vient de fêter ses 19 ans en cours de tournoi.

En finale, le gaucher argentin Mariano Puerta ne semble pas en mesure d’inquiéter l’Espagnol. Puerta est un joueur particulier. Déjà suspendu deux ans pour usage de produits dopants, il fait son retour sur le circuit lors de cette saison 2005. 37e joueur mondial au début du tournoi, il réussit à se frayer un chemin jusqu’à la finale. Vainqueur en cinq sets de Guillermo Canas en quart de finale et de Nikolay Davydenko en demi, son état de forme fait l’objet de nombreuses interrogations. Pourtant, c’est lui qui rentre le mieux dans cette finale, en empochant le premier set : 7-6, en 1h12. Mais il en faut bien plus pour décourager Rafa, son mental en acier est inoxydable. Puerta est moins bien lors des deux manches suivantes, il multiplie les erreurs, tandis que Nadal monte en régime. Un relâchement qu’il payera cash : 6-3, 6-1. Le quatrième set est quant à lui bien plus accroché, l’Argentin obtient même deux balles pour égaliser à deux manches partout. Il ne parvient pas à les convertir, sa chance vient de filer. Rafael Nadal s’octroie son premier Grand Chelem, son premier d’une longue série à Roland-Garros. Cette finale sera néanmoins ternie par des affaires en coulisses. Au soir même de sa défaite, Mariano Puerta sera contrôlé positif à l’étiléfrine, un stimulant cardiaque. Une récidive qui lui vaudra une suspension de 8 ans, finalement ramenée à 2 ans.

Source: Visual / Icon Sport

Malgré tout, cette triste histoire ne peut pas faire oublier la grandeur de l’exploit réalisé cette année-là par le jeune Rafael Nadal. Cette saison 2005 qui devait être celle de la confirmation, après deux premières années en dents de scie est finalement celle de l’avènement du prodige Espagnol, tout en haut de la hiérarchie mondiale : onze titres, 89% de victoires, un Grand Chelem, 4 Masters 1000, 50 victoires pour 2 défaites sur terre battue, la machine est lancée et prête à tout détruire sur son passage. La suite est connue de tous. Rafa devient l’un des plus grands joueurs que le tennis ait connus : 19 titres du Grand Chelem dont 12 Roland-Garros, 5 Coupe Davis, 2 médailles d’or aux Jeux Olympiques, 35 Masters 1000 et le seul joueur de l’histoire à avoir été numéro un mondial sur trois décennies différentes. Désormais âgé de 33 ans, l’actuel 2e mondial rêve de dépasser Roger Federer et ses 20 titres du Grand Chelem pour être bel et bien, le Greatest Of All Time.