Dans l’attente de voir les coureurs se déchirer pour la tunique couleur soleil, les jours s’étiolent, le pouls s’accélère avec l’irrésistible désir de pouvoir assister à cette grande fête. Ce Tour de France 2020 rentrera dans la légende de gré ou de force. Tout d’abord à cause du contexte sanitaire qui a obligé les organisateurs à le décaler du 29 août au 20 septembre. Ensuite, parce que cette édition très montagneuse s’annonce tout simplement dantesque avec pas moins de 20 coureurs pouvant espérer parader de jaune et de gloire aux Champs-Elysées. Pour rentrer dans la légende du cyclisme, il faudra d’abord déjouer le train effréné d’Ineos (pour Bernal et Carapaz) et de la Jumbo Visma (pour Roglic et Dumoulin) qui tenteront de cadenasser la course. A noter l’absence de Christopher Froome et de Geraint Thomas (Ineos), 5 Tours de France à eux deux, non retenus par leur manager, Dave Brailsford. Steven Kruijswijk, co-leader de Roglic, s’est quant à lui fracturé l’épaule lors du critérium du Dauphinéet a dû renoncer… cruel.
Le Tour de France se modernise
« Vous aviez l’habitude de voir le champion entouré de deux hôtesses, avec cinq élus d’un côté et cinq représentants des partenaires de l’autre. Là, ce sera différent avec un seul élu et un seul représentant du partenaire du maillot jaune, ainsi qu’une hôtesse et un hôte pour la première fois » a annoncé Christian Prudhomme, directeur du Tour de France. L’année dernière une pétition, ayant recueilli 38 000 signatures, avait été lancée pour dénoncer cette tradition sexiste faisant de ces hôtesses des ornements au même titre que les récompenses qu’elles remettaient. Quant à la coutume du « bisou » pour le vainqueur, elle est, de fait, supprimée pour cause de crise sanitaire. Par ailleurs, qui dit pandémie dit « bulle sanitaire » pour veiller au bon déroulement du Tour de France. Dans le but d’éviter la propagation du virus au sein du peloton, les coureurs seront autant que possible protégés des contacts extérieurs. Enfin, si une équipe déclare deux coureurs positifs à la Covid-19, alors toute l’équipe sera exclue du Tour.
Les jeunes français montrent les crocs
Côté français, la liste des prétendants est longue. Le grimpeur David Gaudu, 23 ans, fait office de grand espoir du cyclisme tricolore. Cette année encore, il se sacrifiera pour son leader, Thibaut Pinot, mais la passation de pouvoir entre ces deux cracks devrait avoir lieu dans les années à venir. Toujours du côté de la Groupama-FDJ, à noter la présence du puncheur Valentin Madouas (24 ans) qui participera à son premier Tour de France. Maxime Chevalier (B & B Hôtels–Vital Concept), 21 ans, sera quant à lui le plus jeune participant du Tour. Benoît Cosnefroy, 24 ans, le coureur d’AG2R La Mondiale, fait partie des futurs grands puncheurs du peloton. En 2017, il est devenu champion du monde espoir sur le circuit de Bergen. Depuis la reprise, il a remporté la dernière étape du Tour d’Occitanie devant tous les grands du peloton (Bernal, Pinot, Mollema, Porte, Vlasov…), alors pourquoi ne pas rééditer l’exploit lors de la Grande Boucle !
Une meute de louveteaux prêts à détrôner les cadors du peloton
A l’international, les jeunes pépites sont nombreuses et comptent bien illuminer le tour de leur talent. Le premier se prénomme Egan Bernal. L’année dernière, il devenait à 22 ans le 3ème plus jeune vainqueur du Tour… Historique ! Cette année, il sera l’homme à battre. Derrière, côté leader, on retrouve Daniel Martinez (Education First), 24 ans, bien décidé à jouer les trouble-fête et à viser le haut du classement général. Il a récemment remporté le Critérium du Dauphiné, le 3ème colombien de l’histoire à réaliser cet exploit, 29 ans après Lucho Herrera… ça classe un homme ! Quant au jeune slovène Tadej Pogačar (UAE Team Emirates), 21 ans seulement, il est l’une des révélations de l’année
2019. Pour sa première participation à un grand tour, il a terminé à la 3ème place de la Vuelta. Dantesque ! Cette année il va s’essayer au Tour de France avec déjà pour ambition de revêtir le maillot jaune.
D’autres se font les griffes et prennent rendez-vous avec demain
Derrière, d’autres jeunes éclaboussent le peloton de leur talent mais seront bridés et devront rester au service de leurs leaders, pour cette année du moins. C’est le cas du Franco-Russe Pavel Sivakov (Ineos), 23 ans, qui devra se sacrifier au service d’Egan Bernal. Côté Jumbo Visma deux coureurs brillent de mille feux. Wout Van Aert est tout simplement le meilleur coureur au monde actuellement. Le prodige belge de 25 ans réalise une seconde partie de saison ébouriffante. A son actif, la victoire lors des Strade Bianche, de Milan-San Remo (devant Julian Alaphilippe), d’une étape sur le Critérium du Dauphiné et il a récemment conservé son titre de champion de Belgique du Contre la Montre. Lors du Dauphiné, Sepp Kuss, 25 ans, était le dernier étage de la fusée Jumbo-Visma pour mettre Primoz Roglic sur orbite. Il s’est ensuite adjugé la dernière étape de l’épreuve, une étape folle et mouvementée qui s’est jouée à la cuisse… et le plus fort s’appelait Sepp Kuss.
Vainqueur sortant du Tour de France, le Colombien est un solide favori de la Grande Boucle. L’an passé, à 22 ans, il est devenu le 3ème plus jeune vainqueur du Tour de France. Cette année, l’équipe Ineos, toute dévouée à son leader, cadenassera la course pour mettre le Colombien de poche sur orbite. Petit bémol cependant, Egan Bernal a abandonné à l’orée de la 4ème étape du Critérium du Dauphiné se plaignant d’un mal de dos et se retrouvant malmené par Roglic et les autres favoris du Tour de France. Plus qu’un mal de dos on peut penser à un mal au mental.
Roglic est l’autre épouvantail du Tour de France. Il a récemment écrasé la concurrence lors des premières étapes du Critérium du Dauphiné, dont Egan Bernal, avant un abandon consécutif à une chute sans gravité. Impressionnant de facilité, le coureur de la Jumbo Visma apparaît comme le réel favori du Tour de France. 4ème du tour en 2018 et vainqueur de la Vuelta l’année dernière, Roglic est prêt et cette année il sera accompagné de l’équipe la plus solide, sur le papier du moins !
Tom Dumoulin sera le co-leader de Roglic. Peu en forme à la reprise de la compétition, il est monté en intensité au cours du Critérium du Dauphiné. Impressionnant lors de la dernière étape, il a déposé Thibaut Pinot et Guillaume Martin, langues tirées, visages marqués, histoire de montrer à ses entraîneurs, ainsi qu’aux spectateurs, qu’il sera bel et bien l’un des grands favoris du Tour de France. Ses faits d’armes ? Le Tour d’Italie 2017 / 9 victoires d’étapes en Grands Tours / 2ème du Tour de France en 2018.
Thibaut Pinot ou l’étoile filante du TDF 2019. Impérial, survolté, les adjectifs manquent pour décrire l’impression qu’il donnait en montagne, fusionnant avec son vélo. Mais une blessure l’a mis à terre alors qu’il survolait le Tour tel l’Albatros de Baudelaire. Cette année encore, le coureur de la Groupama-FDJ sera la plus grande chance française de ramener le maillot jaune à Paris depuis… Hinault en 1985. Les jambes, Thibaut Pinot les a, c’est une certitude, mais le mental reste son talon d’Achille. Cela s’est encore démontré lors de la dernière étape du Critérium du Dauphiné. Premier lors de la dernière étape, après l’abandon de Roglic, il n’a pu faire face aux attaques des autres favoris. Tous devant et lui derrière, déboussolé, proche d’abdiquer… mais les encouragements des autres français (Alaphilippe, Bardet, Barguil) lui ont donné un coup de pédale, et ont réussi à le remotiver, bien que trop tard.
Il fut un temps où Nairo Quintana était le seul à pouvoir se mesurer à l’armada Sky (Ineos). Depuis 2017, le Colombien semblait emprunté, à bout de souffle, en fin de course. Mais le début de cette année 2020 et son départ de la Movistar pour la team Arkéa Samsic l’a vu renaître de ses cendres. Un début d’année en fanfare pour finir en apothéose ? Ses faits d’armes ? Giro 2014 / Vuelta 2016 / 8 étapes de grands tours / 3 podiums sur le TDF